Jean-Daniel Laumonier Manoll,
octobre 2014
Cette exposition met en scène une petite pièce botanique dans un théâtre au décor immuable, avec une unité de lieu pour nous affranchir du temps. Par le biais d’une curiosité personnelle pour la morphologie végétale, ces portraits de plantes constituent avant tout un hommage aux cueilleurs pour qui l’esprit de découverte préludait aux collectes et à leurs études.
C’est une aventure humaine au cœur de la botanique dont parle Castiglioni en 1935 en relatant ainsi leurs efforts et leur acharnement : «ils s’enfonçaient dans les recoins les plus profonds, les forêts les plus obscures, gravissaient les ravins les plus escarpés, ramassant partout, à droite et à gauche, étiquetant d’un signe mystérieux, le produit de leurs recherches noctambules.
Cette phrase simple et musicale, propédeutique à mes recherches, a provoqué en moi le désir photographique d’observer et de cristalliser dans la semi-obscurité d’un studio de fortune l’organicité de quelques fruits, la chair des légumineuses, la sensualité d’une plante, la nudité d’une racine … Les tropismes des végétaux, remarqués dans les quelques animations sérielles que j’ai réalisées pour percevoir leur croissance ou décroissance, me firent prendre conscience des complexités visuelles et physiologiques des plantes, terreau ici de mon imaginaire.
Pour autant il n’y a aucune approche scientifique dans ces images mais la volonté de ma part d’observer de manière contemplative et sensorielle la communauté végétale et par extension de livrer et d’offrir un témoignage sur papier de cette expérience ; principalement par empathie pour les inventeurs de la « botanique parallèle », chercheurs d’hétérotopies et ouverts aux signes poétiques pour mieux écorner nos certitudes ; et ce, pour le plaisir fugace de partager avec vous, par moments, ce jardin des illusions.

Enfant, je distinguais mal le règne végétal du règne animal, et attribuais aux plantes une forme de conscience, voire d’intelligence, que les derniers développements de la science semblent confirmer. Plus tard je découvris les natures mortes
de quelques Maîtres flamands dans lesquelles le végétal est l’incontestable vedette.
Devenu adulte, j’oubliai ce que je tenais pour fantasmes – et avais bien tort. Jean-Daniel Laumonier-Manoll, avec ses étonnants portraits de légumes et de fruits, nous montre que le végétal peut adopter un certain zoomorphisme, voire anthropomorphisme.
Les regarde-t-il avec un œil d’enfant ?
Certains sont clairement, pourtant, réservés aux adultes.
Ses compositions magistrales nous donnent à voir ce à côté de quoi l’on passe le plus souvent, la beauté dans les choses simples. Et sa science de l’éclairage nous livre les moindres détails de ses sujets.
À déguster avec gourmandise !
Raymond Piganiol